Les troubadours sont à l’origine de la poésie profane en Occident. Leur nom vient du bas latin trobar, qui signifie trouver ou… composer des vers ou de la musique (on les appelle aussi trouvères en langue d’oïl, le français du nord). Ils vont de château en château et racontent des épopées en vers qui magnifient les vertus chevaleresques. La Chanson de Roland est la plus célèbre de ces épopées ou chanson de geste (du latin gesta qui signifie action et désigne un exploit guerrier).Ces poètes originaires pour la plupart d’Aquitaine ou de Provence ont inventé l’«amour courtois», fait de tendresse et de passion. Ils sont en général d’extraction noble ou bourgeoise. Certains appartiennent même à la haute noblesse. C’est le cas du duc Guillaume IX d’Aquitaine, grand-père d’Aliénor d’Aquitaine.À côté des troubadours, on rencontre aussi des amuseurs de moindre condition : les jongleurs et les ménestrels ; ces derniers jouent d’un instrument de musique (leur nom vient du bas latin ministerialis et désigne un serviteur ordinaire). N’oublions pas la forme féminine de ces personnages médiévaux: La trobairitz en langue d’oc et la trouveresse en langue d’oil, poétesses et compositrices.
Extrait de: Le dictionnaire de l’histoire
Vers le début du XIIè siècle, dans la France du sud, un nouvel art fit son apparition : la poésie lyrique, chantée ou parlée en langue vernaculaire (langue vulgaire), par les troubadours.
Évoquer le mot « troubadour ou trouvère » suggère immédiatement le musicien itinérant.
Le luth sur l’épaule, voyageant de château en château, pour y chanter ses romances. Il en est ainsi de quelques personnages de notre histoire, dont l’image conventionnelle et erronée est solidement ancrée dans l’imaginaire commun. La réalité est tout autre…
Le terme occitan trobador (troubadour) désigne, dès le XIIe siècle, la personne qui trouve…
C’est-à-dire qui invente des œuvres poétiques portées par des mélodies. Le troubadour est donc à la fois auteur et compositeur de pièces qu’il interprète lui-même devant ses amis, dans le cadre de la cour à laquelle il est attaché ou invité, la « performance » pouvant être également assurée par un autre troubadour, plus rarement par un jongleur. Trobar, trobador, dérivent de tropare et tropatore, formes médiolatines* elles-mêmes issues du mot latin tropus qui signifie « trope », pièce composée pour enrichir la liturgie, notamment en Aquitaine, dès le IXe siècle, à l’abbaye Saint-Martial de Limoges, dans la région où sont apparus les premiers troubadours. Cette parenté sémantique révèle sans doute une parenté musicale, d’autant que des rapports de similitude ont pu être relevés entre les mélodies issues des monastères et celles issues des châteaux.
Certes, les mélodies des troubadours ne sont pas sans rapport avec celles du plain-chant (chant liturgique catholique). Cependant, des différences sensibles distinguent les deux répertoires, tant dans leur fonction que dans leur écriture : les chants des troubadours sont exclusivement (sauf de rares exceptions) profanes tandis que le plain-chant célèbre la louange de Dieu, dans une relation entre l’humanité et le monde divin.
Par ailleurs, la production des troubadours est ponctuelle, limitée dans le temps.
On connaît l’auteur de telle ou telle chanson et l’on sait qu’il l’a composée à une occasion précise. L’invention des mélodies du plain-chant, quant à elle, s’étend sur plusieurs siècles. Elles restent anonymes et ne sont jamais l’expression de sentiments personnels, d’une subjectivité ; elles sont encore chantées de nos jours.
Les XIIe et XIIIe siècles, qui ont vu naître quelque quatre cent soixante troubadours, si l’on inclut les trobairitz, les femmes cultivant le trobar, ont pu être considérés, à juste titre, comme l’âge d’or de la lyrique occitane. Il nous reste quelque deux mille cinq cents poèmes composés par les troubadours mais seulement, hélas, deux cent soixante mélodies, soit un dixième de leurs œuvres, mélodies essentiellement contenues dans quatre grands recueils manuscrits dits chansonniers. Or l’importance qu’ont pu revêtir ces chants dépasse largement le cadre d’un divertissement culturel, sauf à comprendre la culture comme formatrice d’une idéologie et d’une civilisation. Tel a été le pouvoir de ces chants : composés en langue d’oc (les trouvères, au Nord, écrivent en langue d’oïl), ils ont suscité une rupture linguistique par l’abandon du latin au profit de la langue vulgaire et ont ainsi doté les laïcs de modes d’expressions qui leur étaient propres. De nombreux troubadours appartenaient à la noblesse, étaient pourvus de titres, de fiefs et de biens, quelques-uns étaient issus du clergé comme le moine de Montaudon. Ceux qui ne possédaient pas de biens propres tels Marcabru, Bernart de Ventadour ou Guiraut de Bornelh ou les jongleurs Cercamon, Albertet, Pistoleta et Guillaume Augier trouvaient des protecteurs dans la noblesse. Un petit nombre d’entre eux étaient des bourgeois, des commerçants, tels Folque de Marseille, Peire Vidal, Peire Ramon de Tolosa et Aimeric de Perguilhan.
Le premier troubadour connu n’est pas le moindre : au début du XIIe siècle, Guillaume IX d’Aquitaine, 7ème comte de Poitiers, 9ème duc d’Aquitaine (1071-1127), grand seigneur, riche et puissant, écrit en langue vulgaire des chansons (nous en connaissons onze) où figure déjà l’ensemble des thèmes que développeront les troubadours et les trouvères, de pièces très crues aux chansons exquises d’un raffinement poétique que bien d’autres après lui n’égaleront pas. Il jette d’emblée les bases de l’érotique occitane que l’on appellera la « Fin Amor » puis l’amour courtois.
Ce grand personnage qu’était Guillaume IX n’hésitait pas à chanter lui-même ses propres poèmes, comme il l’annonce simplement :
« puisque le talent m’a pris de chanter, je ferai un vers »
Parlant de l’une de ses chansons, il dit :
« Mes vers sont tous de longueur égale ; je me loue de l’air que j’ai adapté ; il est de bonne valeur »
Extrait de: Le Moyen age Toubadour, Trobariritz, Trouvére.(Bibliothéque de Nice )