La Musique et les instruments au Moyen-Age.

LA MUSIQUE AU MOYEN-AGE.

 Les instruments de Musique au Moyen Age sont nombreux, étant donnée l’étendue de cette période de l’histoire qui s’étend du Ve au XVe siècle. Malheureusement peu d’exemplaires nous sont parvenus intactes. Aussi nous pouvons les retrouver dans l’iconographie médiévale au travers de peintures et gravures, de dessins sur parchemins de l’époque mais également sur le fronton des édifices religieux, sous la forme de bas- reliefs ou de statuaires. 

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 Manuscrit Fr 152, f° 187v, Chantres au lutrin

          La musique dite médiévale apparaît tout d’abord au sein de l’église .Ce sont  des chants issus de la tradition orale qui trouvent leurs sources soit dans la culture populaire soit dans la liturgie, sources qui peuvent avoir pour origine des périodes situées bien avant le Vème. L’instruments le plus  utilisé est alors la voix, qui peut être accompagnée par quelques instruments “primitifs” comme la flûte ou toutes formes de percussions et sonnailles (cloches, grelots,triangle etc…). Les chants sont en latin et sont interprétés sous formes  d’ Hymnes,Cantiques et psaumes issus des textes Bibliques. Ce sont généralement des chants que l’on appelle monodiques (à une seule voix). Ils sont interprétés par des moines lors d’offices religieux, prières et fêtes commémoratives. Parmi ces pratiques du Moyen-Age on retrouve les chants grégoriens: ce sont des chants codés ayant leurs propres règles.  Ils sont institués par l’église et notamment par Le Pape Grégoire le grand au VIIème siècle. On parle de plain-chant en ce sens que cette musique sacrée est monodique a cappella, c’est à dire sans accompagnement instrumental, et modale, c’est à dire sans rupture rythmique  et harmonique. Pour le moment la musique n’est pas à proprement dite écrite. Jusqu’au XIème siècle cette discipline va chercher à se perfectionner notamment en recherchant divers systèmes de notation la rendant ainsi plus “savante”.  A partir du XIIème jusqu’au XIVème siècle la musique médiévale va connaître une grande évolution par l’enrichissement harmonique des chants en y associant d’autres voix. C’est l’apparition de la polyphonie, période appelée Ars Antiqua : les voix peuvent chanter soit à l’unisson, soit à l’octave, à la quarte ou à la quinte. De même grâce à la notation  va se concrétiser avec l’écriture des différentes voix la durée des notes, et la rythmique.Comme nous l’avons vu, cette révolution va s’opérer surtout au niveau de la musique sacrée, mais la musique dite profane (en dehors de toute inspiration religieuse) va profiter et participer à la création de cette avancée et  développer petit à petit son propre répertoire.Les principaux acteurs de ce mouvement artistique sont  les Troubadours du Sud de la France qui s’expriment en langue d’Oc et Les Trouvères du Nord  de La France s’exprimant en langue d’Oïl. Ceux -ci sont des poètes qui mettent leurs textes en musique et dont les inspirations privilégiées sont l’amour courtois, les chansons de geste relatant l’esprit chevaleresque, les faits de guerre et épopée réels ou imaginaires de tel ou tel personnage. Ce sont des artistes compositeurs issus généralement de haut rang, appréciés par les cours seigneuriales . Leurs œuvres sont parfois colportées de villages en châteaux par des interprètes de statut moindre appelés Jongleurs (du latin joculator qui signifie amuseur ou ménestrel du latin ministralis signifiant serviteur. Ces personnages exerçaient diverses disciplines dont la musique pour distraire l’assemblée. D’autres personnages  importants sont apparus à cette époque : les Goliards. Ce sont des Clercs généralement issus d’universités que l’on qualifierait de “bons vivants” : moines itinérants et auteurs de chansons grivoises faisant l’éloge du vin et de l’amour,  ainsi que de poèmes profanes qu’ils pouvaient présenter de façon théâtrale pour contester de manière satirique l’église, la noblesse et la royauté. Les célèbres Carmina Burana témoignent de la richesse créative de ces compositeurs ecclésiastiques.

 Lien: Chants Grégoriens:

Ainsi à partir du XIVème siècle les compositeurs vont prendre de plus en plus de libertés au niveau de leurs œuvres. Ils vont s’échapper de plus en plus des recommandations de l’église pour apporter à  la musique de nouvelles sources d’inspiration et d’autres modes de fonctionnement. La polyphonie va s’enrichir de nouvelles harmoniques comme des successions  d’accords; de nouvelles formes rythmiques mêlant ternaire et binaire vont apparaître,  mais surtout la notation va devenir de plus en plus précise et savante au XVème pour devenir très proche de celle que l’on connait aujourd’hui.

 LES INSTRUMENTS DU MOYEN- AGE:

 Les instruments à vent.

 Les Flûtes:

Les sifflets: prémices  des flûtes, les sifflets  sont en bois, en os, en terre, en céramique, et sont surtout utilisés comme jouets ou comme appeaux.

La flûte existe depuis la préhistoire. Au Moyen Age elle est répandue dans toute l’Europe. Appelée flûte à  sifflet,  ses formes sont variées. Elle fonctionne avec un bec(sifflet) dans lequel on souffle pour faire vibrer une colonne d’air contenue dans un tube de longueur et de matériaux divers. Les notes sont produites en ouvrant ou en bouchant des trous qui réduisent ou augmentent la colonne d’air. Le plus souvent la flûte médiévale est en bois de qualité mais aussi de facture moins noble, comme le roseau ou le sureau selon les régions. Ces matériaux seront surtout utilisés  pour fabriquer des instruments populaires destinés à faire chanter et danser les gens. L’iconographie médiévale nous dévoile de nombreuses formes et manières de jouer de la flûte : la flûte à trois trous, appelée parfois flageolet qui permet de jouer d’une main la mélodie et de s’accompagner de l’autre main avec un tambourin donnant le rythme, la flûte double, triple, etc qui va s’apparenter à l’orgue et va permettre  d’obtenir des harmonies grâce notamment à la présence d’un bourdon, la flûte harmonique sans trou qui fonctionne par modulation du souffle  en bouchant ou débouchant l’extrémité, la flûte traversaine, ancêtre de la traversière, le frestel médiéval composé de tubes assemblés ou creusés directement dans la masse et qui s’apparente à la flûte de pan, utilisée notamment par les bergers. On rencontre également des flûtes en os et même en corne ou le gemshord proche de l’ocarina le tout avec des sonorités différentes.

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Instruments à embouchure:

Le cor, la corne d’appel, aussi appelé olifantest composé soit d’une embouchure comme la trompette soit d’une anche. C’est un instrument utilisé pour la chasse, donner l’alerte ou demander du secours lors de bataille comme l’illustre  la chanson de Roland “de Roncevaux”. A partir de la Renaissance le cornet à bouquin sera muni de trous pour jouer les notes.

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La trompette médiévale ou Busine ou buisine, apparue au XIIIème siècle, est un instrument en métal surtout utilisé par les hérauts lors des tournois ou les soldats pour prévenir d’un danger  ou pour tout autre signal. Au Maroc appelé Nafir, cet instrument est encore utilisé. A partir du XIVème cette trompette va évoluer et se munir d’un système de coulisse comme le trombone. Au XVème on l’appelle Sacqueboute et sera très utilisé à la Renaissance.

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 Cantigas de Santa Maria                    hans memling retable de najera anges musiciens Flandre XVème.

 

Les Instruments à anche:

Le hautbois médiéval:

Représentés depuis la Grèce Antique les hautbois sont de formes et de styles  nombreux et variés. Tous les instruments de cette famille fonctionnent de la sorte:le principe ressemble à celui d’une flûte, c’est un cylindre percé de trous mais ici on souffle dans une anche . L’anche qui peut être simple ou double est composée de lamelles de roseau que l’on fait vibrer pour faire sonner l’instrument. La perce peut être cylindrique ou conique, selon l’effet recherché, et de longueurs différentes, selon le timbre recherché. A partir du XIIème siècle on nomme ces instruments chalumeaux, chalémie (calamus en latin : roseau).Ces instruments sont considérés comme païens et diaboliques. Ils accompagnent les danses populaires. Leur timbre puissant pouvait accompagner les cornemuses.

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 Chalumeaux, chalémies , Enluminures Cantigas de Santa Maria.

La Cornemuse:

Ce qui peut s’apparenter à la cornemuse telle que nous la connaissons aujourd’hui, c’est à dire l’utilisation du son continu, serait apparu sous l’Antiquité; mais les sources sont rares et hypothétiques jusqu’au XIIème siècle. Au Moyen Age les sources littéraires et iconographiques sont plus fréquentes et  attestent de sa fréquente utilisation. Sa forme primaire est composée  d’un porte-vent ou bouffoir dans lequel on souffle, d’un tuyau  ou chalumeau mélodique conique percé de trous comme la flûte et pourvu d’une anche simple (languette en roseau,sureau,paille,os,tige de plume) et d’une poche réalisée à partir de cuir, de peau ou parfois d’une vessie. Cette poche permet d’avoir une réserve d’air permettant de jouer sans maîtriser la technique de la respiration circulaire .

Dés le XIIIème siècle la morphologie de la cornemusechevrette, ou muse va beaucoup évoluer. Elle peut  être munie de plusieurs tuyaux de formes diverses (cylindriques, coniques, rectangulaires) et de bourdons renforçant l’effet du son continu. Les anches qui servent de sifflets sont fabriquées la majeure du temps en roseau et peuvent être simples ou doubles. Au Moyen Age la cornemuse va être utilisée dans divers contextes. Il peut être un instrument pastoral souvent représenté joué par des bergers dans les scènes de la nativité, mais aussi de manières populaires  pour animer et faire danser les gens lors de différentes manifestations comme les fêtes de village ou encore pour amuser la haute société lors de grands festins et banquets . Cette connotation profane lui valut  d’être mal perçue par le monde chrétien ainsi que ses interprètes : les jongleurs et ménétriers. Cependant son jeu ne manqua pas d’admirateurs autant au sein du monde civil que religieux.

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           Cantigas de Santa Maria

Le Tournebout ou “cromorne”:

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Hautbois à anche double à perce cylindrique muni d’une capsule dans laquelle on souffle (l’anche est encapuchonnée ou encapsulée et donc n’est pas en contact avec les lèvres)  sera utilisé à la fin du Moyen Age. Son nom allemand est krumhorn : krum (courbé) et horn (corne). Le mot cromorne désigne plutôt le hautbois baroque.

 Vitore Carpaccio (détail) .

Les instruments à cordes:

La vielle à roue:

L’organistrum, la chiffonie, la vielle à archet, l‘ancêtre de la vielle à roue,  sont apparus il y a 1000 ans en Occident et pour certains historiens les origines viennent d’Orient. L’organistrum,  que l’on retrouve sur de nombreuses enluminures et tympans d’églises de l’art roman, est le premier instrument à corde et à clavier doté d’une mécanique à la fois mélodique et rythmique qui se jouait à deux. L’un tournait une manivelle actionnant une roue faisant office d’archet et frottant deux cordes de manière perpétuelle ainsi qu’un bourdon donnant la tonique et le rythme. L’autre actionnait des tirettes mobiles faisant office de clavier en raccourcissant la longueur vibrante des cordes pour faire sonner les notes. C’est un instrument diaphonique généralement à trois cordes accordées en quinte octave, par exemple sol do sol ou sol ré sol. Il est inventé et utilisé par les moines  bénédictins au XIIème siècle pour accompagner des chants grégoriens polyphoniques du répertoire religieux appelé organum. Il va disparaître des églises, détrôné par l’orgue à tuyaux de plus en plus performant,; aussi cet instrument va se développer dans la musique dite savante et profane et notamment comme instrument de musique populaire.

Succédant à l’organistrum,la  chiffonievielle à roue médiévale du nom symphonie ou symphonia, va du XIIème au XIII ème siècle se simplifier au niveau du jeu car il  ne suffit plus dorénavant que d’un seul joueur qui actionne à la fois la manivelle et appuie sur les tirets pour émettre les notes. De plus en plus autonome et avec un répertoire lui étant propre, la vielle à roue va se démocratiser et être utilisée par différents musiciens et classes sociales de l’époque : troubadours, ménestrels et certainement goliards vont animer les diverses festivités avec un répertoire très varié qui se compose soit de chansons d’amour et de gestes, soit de chansons grivoises et paillardes à boire et satyriques  pour amuser et faire danser les gens. Au fil du temps la vielle à roue médiévale issue de l’église va ainsi devenir un instrument ayant une connotation profane et vulgaire qui sera même utilisé à la fin du Moyen Age par les gueux et  les mendiants. 

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 Si dessus: Enluminure des cantigas de Santa Maria XIIIe, Organistrum Cathédrale de Saint Jacques de Compostelle 1188.Partie du tableau: L’enfer de Jérôme Bosch (musée du Prato Madrid).

A partir du XIVème siècle la vielle à roue va poursuivre son évolution .La caisse de résonance va augmentée ainsi que le nombre de cordes, un chevalet mobile que l’on appelle chien va apparaître pour faire vibrer une corde appelée la trompette. Le musicien en faisant  des coups de poignet ou des détachés  sur la manivelle va pouvoir créer un rythme accompagnant la mélodie.

Les instruments médiévaux  à cordes et à archet sont divers et variés. On rencontre La gigue (monoxyle à une ou deux cordes), la vielle à archet, ou encore le rebec rabad arabo-andalou. La vielle à archet serait apparue au XIIème siècle et sa caisse peut avoir différentes formes .C‘est un instrument présenté comme le plus noble des instruments du Moyen Age car demandant une grande maîtrise et habilité du musicien. C’est un instrument à manche et à 2/5 cordes frottées par un archet.

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Les “guitares” médiévales:

Le Luth est certainement l’instrument à cordes le plus connu du Moyen Age. Il vient du nom arabe oud (al oud, bois) qui apparemment donnera  le nom de luthier. Apparu en Italie et Espagne musulmane, c’est un un instrument majeur de la musique arabo-andalouse représenté fréquemment sur les enluminures des Cantigas de Santa Maria. Il désigne également l’ensemble des instruments à cordes pincées tendues sur un manche fixé sur une caisse de résonance bombée en forme de demi-poire. A priori jusqu’au XIIIème siècle, la caisse est creusée dans la masse d’une pièce de bois (caisse monoxyle) puis de lamelles de bois collées. Les cordes sont généralement doublées en acier ou en boyau naturel et le chevillier est en angle par rapport au manche.

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Il existe bien d’autres instruments s’apparentant à la guitare et dont les spécificités s’adressent aux spécialistes :  la citole, le cistre, la guiterne, la mandore, la maurache, etc….

Les cithares:

  Psaltérion, Psaltérion, tambourin à corde, dulcimer

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A SUIVRE…..